La dermatite atopique gagne du terrain

Mots-clés :  Dermatite atopique

date: 
27/09/2010 - 10:30
Sonia Marquès-Briand Dermatologue vénéréologue

Sonia Marquès-Briand, 36 ans, est dermatologue vénéréologue en Gironde. Mère de 3 enfants, elle est diplômée de la Faculté de Nantes et ancien chef de clinique des universités assistante des hôpitaux.

La dermatite atopique, également appelée eczéma atopique, touche environ 30 % des bébés de 3 mois. Si les causes de cette affection cutanée ne sont pas clairement identifiées, certains gestes peuvent en atténuer les effets. Le point avec la dermatologue Sonia Marquès-Briand.

 

Depuis de nombreuses années, l’eczéma augmente de façon constante dans les pays industrialisés. Pourquoi ?

On sait aujourd’hui que le terrain génétique joue beaucoup dans les dermatites atopiques : ainsi, on estime que 50 à 70 % des patients atteints de cette affection cutanée ont des parents présentant des manifestations allergiques comme l’asthme ou la rhinite allergique. Par ailleurs, de nombreuses études ont mis en avant plusieurs facteurs, responsables de cette « recrudescence » d’eczéma dans les pays industrialisés :

- Tout d’abord, le type d’allergènes a changé : nous consommons de nouveaux aliments, notamment  exotiques, et il y a de plus en plus d’additifs chimiques et protéiques dans notre alimentation. Les allergènes sont aussi de plus en plus nombreux dans notre habitat : avec une meilleure isolation, l’utilisation de moquettes, les maisons sont confinées et moins bien ventilées, et donc les acariens augmentent de façon drastique.

- Par ailleurs, la peau, censée nous protéger des allergènes (on parle d’ailleurs de barrière cutanée), est fragilisée par nos habitudes d’hygiène. En effet, nous nous lavons plus fréquemment et utilisons des produits plus décapants (savons liquides etc). Or, il y a 50 ans, on ne lavait pas les enfants tous les jours, et bien souvent dans les milieux ruraux, l’eau courante n’existait pas !

- De la même façon, la barrière respiratoire (muqueuse bronchique) est altérée par le tabac passif, par les polluants industriels et automobiles (gaz d’échappement etc…). Enfin, la barrière digestive (muqueuse qui recouvre l’appareil digestif) est modifiée par l’alimentation stérilisée : certains microbes, en effet ont un rôle protecteur. Or la stérilisation des aliments chez les tout petits, tue ces microbes utiles. D’ailleurs, on revient aujourd’hui sur la stérilisation systématique.

En conséquence, c’est tout notre système immunitaire qui est mis à mal ! Au départ, il doit lutter contre les infections. Mais, en l’absence d’infection - comme c’est le cas actuellement dans les pays industrialisés avec une bonne hygiène sanitaire - il va être réagir contre les antigènes présents dans l’environnement et développer une réponse immune allergique... Voire produire lui-même des allergies ! Un exemple ?  On a noté que plus la tuberculose  diminuait plus la dermatite atopique augmentait !

 

Quand conseillez-vous de faire des tests et comment cela se passe-t-il ?

Avant de réaliser des tests, on procède à un certain nombre de vérifications : cassure dans la courbe de croissance (taille et poids), signes évocateurs d’une allergie respiratoire, alimentaire ou de contact… Si l’eczéma persiste malgré les traitements classiques, on va alors se diriger vers des tests :

- Les prick tests : on met une goutte d’allergène sur l’avant bras et on pique au sein de la goutte.

- Les tests épicutanés : on applique des « patch tests » contenant une faible quantité d’allergènes dans le dos et on observe l’apparition ou non d’une réaction.

A ce stade du suivi, les dermatologues travaillent en collaboration avec des allergologues. On peut également demander des prises de sang pour doser les immuno-globulines sériques, etc…

 

Y a-t-il des moyens de prévenir l’eczéma ?

Jusqu'à présent, on n’a identifié aucun facteur, qui pourrait faire l’objet d’une prévention à l’échelle de la population. De même, il n'existe aucun régime particulier chez la femme enceinte, pour prévenir l’eczéma du nourrisson. En revanche, les études montrent qu’en cas d’allaitement maternel exclusif pendant 3 mois, le risque de dermatite atopique chez les enfants à risque est diminué.

 

Un bébé atopique sera-t-il un adulte eczémateux ?

Pas forcément. On estime que pour une dermatite atopique qui a démarré avant l’âge de un an, il y a plus de 50 % de chances pour qu’à 5 ans, elle ne pose plus de problème. Après la puberté, ce pourcentage descend à 10 à 15 %. Pour les enfants qui développent une dermatite atopique plus tardivement, les formes sont plus tenaces.

 

Que risque-t-on à ne pas suivre le traitement à la lettre ?

La dermatite atopique est une pathologie chronique, qui dure plusieurs années… C’est donc compliqué de demander à une maman de respecter à la lettre toutes les recommandations. Il est important de permettre au patient et à ses proches de bien connaître la maladie et les traitements associés, afin de développer des compétences « d’auto-soins » et d’auto-vigilance. L’idéal est de changer certaines petites habitudes quotidiennes, en choisissant notamment des savons surgras et de rester vigilant, notamment en période d’adolescence (lire notre rubrique Astuces et Conseils).

 

Y a-t-il des nouveaux traitements efficaces ?

On a beaucoup parlé des probiotiques ces dernières années. Mais aujourd’hui aucune étude n’a prouvé que la consommation de probiotiques,  notamment chez la femme enceinte, permettait de réduire les risques. Quant à la photothérapie (UVA/UVB), elle est utilisée parfois chez l’enfant et réservée à des dermatites atopiques sévères.

 

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