« L’énurésie est un symptôme répandu et touche 12 à 15 % des enfants de plus de 5 ans. »

Mots-clés :  Enurésie

date: 
07/02/2011 - 15:47
Brigitte Llanas Néphropédiatre

 

Docteur en médecine pédiatrique, Brigitte Llanas dirige le service de néphrologie pédiatrique de l’hôpital des Enfants à Bordeaux.

 

Le pipi au lit n'est pas une fatalité ! Brigitte Llanas, néphropédiatre nous donne des clés pour aider les grands enfants à être propre la nuit...

Il a 8 ans et fait toujours pipi au lit. C’est grave ?

L’énurésie n’est pas une maladie, mais un symptôme ou un signe bénin, multifactoriel avec des causes et des conséquences à la fois physiologiques et psychologiques. C’est pourquoi, il vaudrait mieux parler « des énurésies » et non de l’énurésie. Dans de nombreux cas, tout rentre dans l’ordre rapidement, mais parfois, certaines formes d’énurésie peuvent cacher un problème pus grave : anomalie du comportement vésical (obstruction basse, vessie neurogène), troubles psychiatriques sous-jacents, abus sexuels, voire un dysfonctionnement familial sévère.

 

Comment connaître les causes exactes ?

Le plus simple est de consulter un médecin pédiatre, qui mènera un interrogatoire précis où l’enfant est l’acteur principal. L’enfant doit arriver à décrire son problème et ses conséquences au quotidien (gêne et moquerie, mécontentement des parents, mauvaises odeurs le matin, impossibilité d’aller dormir chez des copains, de participer à une classe verte…). Le médecin réalisera un examen clinique pour éliminer toutes causes organiques du trouble mictionnel : poids taille, pression artérielle, examen uro néphrologique et neurologique. Il analysera également le comportement mictionnel diurne (l’enfant arrive-t-il à se retenir pendant la journée ?) ainsi que le transit. Au terme de la consultation, il pourra établir si l’enfant présente une énurésie mono symptomatique isolée ou une énurésie associée à des anomalies de comportement mictionnel diurne (qu’il conviendra de prendre en charge en premier).

 

Le problème est-il répandu ?

Oui, l’énurésie est un symptôme très répandu puisque il touche 12 à 15 % des enfants de plus 5 ans. L’évolution est habituellement spontanément régressive, avec un taux moyen de disparition de 20 % par an après l’âge de 10 ans. L’incidence et la prévalence sont difficiles à évaluer car les définitions et les méthodes de recueil varient considérablement d’un auteur à l’autre.

 

Quels sont les traitements de l’énurésie ?

Généralement, je conseille aux parents de ne pas consulter trop tôt (pas avant 6 ans). Il faut que la demande émane de l’enfant pour l’impliquer dans la prise en charge. Dans un premier temps, j’explique à l’enfant, à l’aide d’un schéma simple, le fonctionnement des reins et de la vessie, en m’assurant qu’il ait bien compris. Puis, s’il est d’accord, je lui fais signer un contrat dans lequel il doit respecter plusieurs consignes :

- établir un calendrier mictionnel précis,

- respecter des conseils hydriques au cours du repas du soir (pas de boissons sucrées et limitation de la quantité),

- faire 2 dessins : un de sa chambre et un sur ce qui lui fait le plus peur.

Ensuite, en fonction de l’énurésie, il m’arrive de prescrire un traitement, à prendre souvent au moment du coucher. Différents médicaments sont disponibles les anti cholinergiques pour augmenter la capacité de contenance de la vessie et un traitement anti hormone diurétique qui limite la quantité d’urines produites dans la nuit. Les traitements seuls sont insuffisants s’ils sont prescrits sans « accompagnement » et peuvent être dans certaines circonstances dangereux, il faut donc bien les connaître pour pouvoir les utiliser.

 

Quelles sont les conséquences d’ordre social, familial et psychologique chez l’enfant ?

Chez l’enfant, l’énurésie entraîne inévitablement une mésestime de soi avec parfois une introversion, une timidité, une perte de confiance en soi voire une dépression. Sur le plan familial les répercussions sont plutôt d’ordre psychologiques : « quand grandira-t-il enfin ? qu’avons-nous fait de mal ? C’est de ma faute … ». En consultation, il faut donc rassurer, expliquer, calmer… et parfois gronder les parents, car l’enfant ne fait pas exprès de faire pipi au lit ! Les parents doivent avoir confiance en leur enfant. Et l’enfant doit avoir confiance en lui.

 

Si un enfant souffre d’énurésie, qu’en est-il de ses frères et sœurs ?

Des facteurs génétiques ont été démontrés dans l’énurésie, mais en général il n’y a pas de règle concernant la fratrie. Cela dit, il est établi que lorsqu’un des deux parents a présenté une énurésie, le risque pour ses enfants est d’environ 20 % supplémentaire par rapport à la population du même âge. Ce risque augmente à 50 % si les deux parents ont présenté le symptôme dans l’enfance.

 

Les médecines douces sont-elles une bonne alternative ?

Je n’ai pas suffisamment d’expérience et de recul concernant les médecines douces. Mais lorsque j’initie une prise en charge, il faut qu’elle soit globale et sans thérapeutique parallèle.

 

Un avis sur l’alarme stop pipi utilisée aux USA ?

J’ai recours dans certaines circonstances au système d’alarme et cela peut être une aide supplémentaire thérapeutique. Hélas, il n’existe pas de système de remboursement Sécurité sociale en France ce qui parfois peut limiter la prescription.  

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