La migraine n’est pas une maladie psychologique…

date: 
10/09/2010 - 18:06
Dr Daniel Annequin Responsable d'une unité anti douleur

Responsable de l’unité Douleur à l’hôpital des enfants Armand-Trousseau (Paris), le docteur Daniel Annequin est aussi membre de l'association Pediadol, qui réunit médecins et infirmières autour de la prise en charge de la douleur chez l'enfant. 

 

Première maladie neurologique, avant Alzheimer et Parkinson, la migraine touche 10 à 12 % de la population. Souvent niée, elle représente la première cause de céphalée chez l'enfant. Le spécialiste Daniel Annequin fait le point sur la recherche et sur les traitements.

Quelle est la prévalence de la migraine chez l’enfant ?

Dr Daniel Annequin : Longtemps ignorée, voire niée, la migraine chez l’enfant est beaucoup plus fréquente que l’on ne le croit. Elle représente la première cause de céphalée chez l’enfant. On estime aujourd’hui que 5 à 10 % des enfants âgés de 5 à10 ans en souffrent (10 à 15 % chez les 10- 15 ans).

 

On dit souvent que la migraine est psychologique…

Dr D.A : Non, il est essentiel de rappeler que la migraine n’est pas une maladie psychologique que l’enfant « ne fait pas du cinéma » pour éviter l’école, mais très souvent le stress , les contrariétés sont en cause car des facteurs psychologiques, émotionnels peuvent provoquer d’authentiques migraines : excitation, pression familiale, colère, anxiété, rentrée scolaire, contrôle scolaire dispute… Il faut souvent répéter aux parents en consultation que les enfants migraineux sont très sensibles au stress et qu’il est inutile d’en rajouter.

 

Comment établir un diagnostic ?

Dr D.A Le diagnostic de migraine est essentiellement clinique et un examen minutieux suffit pour l’établir par le jeu du questionnement. L’imagerie cérébrale (IRM, scanner) est réalisée plus fréquemment chez les enfants de moins de 6 ans, qui ont parfois du mal à répondre aux questions. En cas de migraine typique, elle reste inutile. Toutefois l’imagerie peut être demandée,en cas d’anomalie à l’examen neurologique, baisse des résultats scolaires, changement d’humeur, aggravation des crises, signes d’hypertensions crâniennes (vomissements matinaux)…

 

Quelle prise en charge et quels traitements préconisez-vous ?

Dr D.A Une fois le diagnostic posé, il est important de rassurer l’enfant et sa famille sur la nature bénigne de la migraine. La tenue d’un agenda de la douleur permet de préciser les facteurs déclenchants, et de dépister une éventuelle surconsommation médicamenteuse. Selon les recommandations de l’AFSSAPS (1), l’ibuprofène (10mg/kg) est à privilégier en traitement de crise. Le traitement doit être pris dès le début de l’accès migraineux. En cas de vomissement, il convient de se tourner vers des suppositoires ou de prendre un médicament par voie nasale. Dans tous les cas, il ne faut pas donner de médicaments contenant des morphiniques (codéine, tramadol, dextropropoxyphène) en raison de leur fréquente inefficacité et des risques de surconsommation, dans le cadre d’une migraine chronique.

 

Que dire des traitements non médicamenteux ?

Dr D.A La supériorité des traitements non médicamenteux a été démontrée dans les recommandations de l’Anaes (agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé) qui souligne l’efficacité de la relaxation, des thérapies comportementales et cognitives dans la prévention de la migraine chez l’enfant et l’adolescent.  Concernant la relaxation et l’hypnose, nous avons mené à l’hôpital Trousseau une étude sur 3 groupes d’enfants migraineux bénéficiant du même traitement médicamenteux (anti-inflammatoire non stéroïdien) : un groupe contrôle (sans traitement de fond) ; un groupe Relaxation : un groupe Hypnose. Au final, on a observé chez les 2 derniers groupes une diminution de 50 % du nombre de crise, avec une atténuation de l’intensité et une action plus rapide des médicaments.

 

Un enfant sera-t-il toujours migraineux à l’âge adulte ?

Dr D.A Le pronostic est favorable, puisque entre 15 et 20 ans, une grande majorité de petits migraineux connaissent une très nette amélioration, voire un arrêt des crises.

(1) : Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. 

 

 

Pour aller plus loin :

www.migraine-enfants.org, un site internet qui propose de télécharger l’agenda de la douleur ;

 www.sparadrap.org, à télécharger sur ce site un livret d’information sur la migraine.

 

 

avec le soutien de :